À l’occasion de son intervention dans le cadre de la Diversité Spirituelle, vendredi 28 mai 2021, Véronique Sommer jette un regard sensible sur son parcours de vie. Psychologue clinicienne, art-thérapeute par la danse, elle évoque notamment les bienfaits qu’elle a su tirer de son expérience de mort imminente (EMI).

 Ma vie a-t-elle commencé il y a 20 ans, lors de mon état de mort imminente (EMI) ?

Véronique Sommer
Véronique Sommer

C’est la première question qui m’est venue quand je me suis attelée à la présentation de mon parcours…

Non, je dirais plutôt que les 39 années avant cette EMI m’avaient préparée à vivre cette expérience, et je dis bien vivre… mourir et vivre… vivre et mourir… je suis née plusieurs fois !

J’ai bientôt 59 ans. À l’aube de cette nouvelle décennie, regarder le passé, mon histoire, me souvenir… pour témoigner que la vie et la mort sont indissociables.

Ma vie personnelle est indissociable de ma vie professionnelle. J’ai longtemps habité rue des Moines à Paris ; ma banque est rue des Abbesses et mon studio Akordance se trouve dans un ancien couvent des Petites Sœurs des pauvres avec une salle de danse dans l’ancien réfectoire des nonnes…

La phrase clef de ma vie : « J’ai toujours la bonne personne au bon moment et c’est pourquoi ma mission ou mon souhait est d’être la bonne personne au bon moment pour chaque personne que je rencontre en souffrance ».

Petite fille mystique

Je me souviens du goût du roquefort et de la sensation chaude et réconfortante, tout contre le ventre rond de mon grand père maternel, de la douceur de sa voix (j’ai un an et demi). Il est mort subitement d’une crise cardiaque un 1er avril, un drôle de poisson ! Une grand mère qui restera veuve et déracinée toute sa vie, qui priait, priait… alors j’ai prié, prié pour qu’il revienne… Petite fille mystique, rêveuse, j’ai cherché, cherché dans le ciel étoilé, mon grand père et je suis devenue… astrologue humaniste.

Je me souviens de l’église, mon lieu refuge, Pierre prêtre ouvrier, son accueil, sa pétulance, ses révoltes, ses enseignements à l’air libre, dans les prairies, les bois attenants à l’église, nos bêtises d’enfants.

Je me souviens, enfant unique, des bals populaires dans lesquels mes parents m’emmenaient dans un couffin. J’ai dansé avant de savoir marcher… Ils étaient jeunes, les moments collectifs étaient joyeux et heureux… Ils aimaient danser, danser, danser. J’ai eu les meilleurs professeurs de danse, la vie.

Véronique Sommer avec un micro

Je me souviens des années sombres à partir de l’âge de 6 ans, la tristesse qui s’installe pour de longues années, une maman atteinte d’une maladie chronique alors qu’elle n’a que 28 ans, ses comas fréquents, ses hospitalisations, ses derniers sacrements… Un père devenu son infirmier de nuit, insomniaque et anxieux… et une mère qui résiste avec une force vitale incroyable jusqu’à ses 67 ans !

« Je ne savais pas que je souffrais »

Entre ces moments douloureux, le sourire retrouvé avec la danse… et la prière.

A 14 ans, m’engager dans les Ordres et devenir Sœur auprès de Sainte-Thérése de Lisieux ? Mon père, son choc : comment pouvais-je savoir que son premier chagrin d’amour avait choisi cette voie spirituelle ?

Je me souviens de ma dépression à 17 ans, échecs scolaires.

A 20 ans tout bascule… et toujours la bonne personne au bon moment… cette fois c’est l’apocalypse de l’amour. Ma rencontre avec mon futur mari, père de mes enfants, artiste à la voix si élégante de Chanson Française. J’avais tant de peurs…

La mise au monde : une nouvelle épreuve, notre enfant entre la vie et la mort. J’ai alors plongé dans la force vitale de la prière, foi inébranlable du lien avec ce petit être qui se battait pour vivre… Quand je lis ces quelques souvenirs, jamais je n’ai pensé que j’étais une petite fille, jeune fille malheureuse… Je ne savais tout simplement pas que je souffrais et mes prières m’ont toujours apaisée, j’étais ignorante de moi-même, mais tellement accompagnée, guidée.

 

L’âme d’une muse

Ma « maman des études » : Maryse Rivoire Delarue, la maman de Jean-Luc Delarue, merci ! Je suis devenue psychologue DE à 28 ans, maman de deux enfants, accompagnant mon mari dans ses tournées, ses spectacles. J’avais l’âme d’une muse. La foi et la rage de vivre, je ne sais plus. J’ai fait une thérapie, psychanalyse freudienne, jungienne… Les patients dans mon cabinet ont afflué et j’ai aimé accompagner tous ces êtres qui se déposaient avec tant de confiance entre mes mains. Mon superviseur un jour très agacé me dit : « Tu as quelque chose qui ne s’achète pas avec un diplôme, alors préserve-le toujours et c’est ton cœur ».

Puis ma rencontre avec le bouddhisme tibétain Dagpo Kagyu Ling et le Lama Guendune, Lama du « Bonheur », une ressemblance avec mon grand père tant aimé. Ses mains sur ma tête et mon évanouissement en public… la honte.

Atelier de danse animé par Véronique Sommer
Lors d’un atelier animé par Véronique.

De fil en aiguille, le tissage de ma vie devait rester ce joli tapis aux couleurs vives et chatoyantes, tapis magique et résistant sur lequel j’aurai dû voler jusqu’à la fin de mes jours… mon rêve de permanence.

L’amour le nouveau chemin…

L’impermanence… nuit noire de l’âme ? Lumière au contraire…

39 ans : âge de mon état de mort imminente…

Pour moi, cette expérience est initiatique, non pas de la mort mais de celle de la vie.

Pourquoi suis-je revenue alors que je me sentais prête pour me fondre dans cette lumière si intense ?

L’amour ?

Mais qu’est ce que l’amour ?

Autant de questions dont les réponses émergent au fil du temps que je tisse maintenant avec, dirais-je, plus de douceur, de féminitude, de sérénité … Mais avant d’en arriver là, j’ai encore beaucoup couru… après le temps…

Véronique Sommer, la psy qui danse
Véronique Sommer, la psy qui danse »

La guérison qui prend son temps, le temps de laisser s’effondrer ce qui doit s’effondrer et de me laisser naître à la conscience, à mon âme… le chemin a été douloureux et tellement salvateur.

Et toujours les bonnes personnes au bon moment… la danse qui me guérit…

C’est aussi ma grande époque dite « développement personnel » : que de stages, de rencontres passionnantes, hors de mes normes, merci.

Je deviens la psy qui danse… j’ai créé mes ateliers cercles de danse de la femme sauvage

Le sacré prend son temps

Cette étape, majeure, j’ai mis 20 ans à l’intégrer… Le sacré prend son temps pour réouvrir tout grand ses portes en chacun de nous.

Et maintenant, à l’aube de cette nouvelle décennie, à cette époque du Covid, une nouvelle sensation ressentie exactement le 11 novembre 2020, celle d’un nouvel enthousiasme, un nouvel élan de cœur, avec, je dirais même, une réponse du pourquoi je suis encore en vie aujourd’hui. Transmettre, ne pas laisser les nouvelles générations seules se débattre dans ce marasme, comme au moment de mon EMI, laisser s’effondrer ce qui doit s’effondrer et nourrir la vie, l’amour, le cœur, le partage.

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